Immobile devant le bâtiment, je le fixe d'un air intrigué, en plein débat intérieur. Est-ce raisonnable de s'aventurer seul dans un bâtiment potentiellement habité par un groupe d'amis zombifié ? Non, assurément. Cependant, la curiosité me titille : qui aurait eu l'idée de venir se réfugier ici avec une bande d'infectés aux trousses ? De plus, la possibilité de pouvoir y dégoter quelques trucs à manger me retient. Une barre chocolatée, des M&Ms, n'importe quoi, pourvu que ce soit mangeable. J'imagine un instant la tête de Kait' si elle me voyait revenir les bras pleins de sucreries dites si mauvaises pour la santé mais que tout le monde avale sans s'en soucier pour autant. Et voilà, il me suffit d'imaginer une petite tablette de chocolat pour me faire pousser les portes du Lawn bowling club.

Malgré l'absence d'électricité, les larges fenêtres de la bâtisse me permettent de voir suffisamment clair à l'intérieur. Je referme la porte le plus doucement possible pour éviter le moindre bruit. A mon grand soulagement, l'endroit semble désert, mais je n'en relâche pas mon attention pour autant. Pour (sur)vivre dans cette ville en ce moment, il fallait accepter d'être en alerte permanente, même dans les situations les plus tranquilles. Après tout, on était jamais à l'abri d'un zombie fourbe errant en silence au coin de la rue vers lequel vous vous dirigez en sifflotant l'hymne américain.

Bref, tout ça pour dire que je balaye prudemment l'endroit du regard avant de m'avancer d'un air timide. La salle est immense, il se pourrait donc que quelqu'un, contaminé ou non, se cache dans l'ombre. Alors, défiant la fatalité, je m'avance vers la piste 13. Pendant un instant, je tente d'oublier ce apocalypse soudain en me rappelant combien cet endroit était chaleureux à son époque prospère. J'aimais moi-même souvent venir ici en compagnie de Mary et de quelques autres amis.

Et alors qu'un mince sourire étire mes lèvres tandis que je laisse mon esprit vagabonder à la recherche de souvenirs agréables, un bruit soudain me tire brutalement de cet état nostalgique. Je sursaute, tente de faire volte-face pour voir ce qui se passe dans mon dos, mais glisse et manque de m'étaler de tout mon long en me rattrapant au dernier moment. Damn, j'aurais du me douter que cette piste était maudite. Je me redresse aussitôt d'un air paniqué, cherchant le coupable de tout ce raffu. Il me semble que cela ressemblait à une porte claquée, peut-être ouverte dans la précipitation.

J'ai à peine le temps de croiser le regard inquiet d'un jeune asiatique qui vient de surgir que la porte ouverte laisse entrer de nouveaux arrivants moins sympathiques. Il semble finalement qu'un groupe d'amis fut assez peu intelligent, voire stupide, pour venir trouver refuge dans un bowling. Je ne prend pas le temps de compter leur nombre exact, j'observe le jeune homme coursé se diriger vers moi alors que mon corps est encore immobile : tout va trop vite pour mon petit cerveau encore sous le coup de la surprise, uniquement capable de se demander : qui-quoi-où-comment-pourquoi et de résumer les réponses en un mot : merde.

Alors, sans prendre le temps de réfléchir, j'attrape le premier truc à ma portée : une boule de bowling. "Je lance la partie !" Drôle de façon de prévenir ce pauvre homme de mon lancer immédiat dans une telle situation, je vous l'accorde. Mais après tout, comme dit le dicton : il vaut mieux en rire qu'en pleurer, hein ! Alors je tente ma chance et lance ma boule avec force en direction des zombies droit devant, dans l'espoir de réaliser le premier strike apocalyptique de l'histoire !