Un démarrage... pas en douceur...
Des coups de feu ? Pas très banal tout ça ! Et cette explosion ? On en parle de cette foutue explosion ? C'était encore moins "normal". Surtout quand cela provient de l'autre bout de la rue !
Le smartphone échappa des mains du colosse étendu sur son lit, venant faire un plat sur son nez. Grognant d'un air renfrogné,
Ingvar fit un violent mouvement de tête, envoyant valser l'appareil, qui ne s'écrasa pas au sol, préférant rebondir comme un dément sur ses coins, pour finir sa course derrière l'armoire de la chambre d'hôtel.
Se redressant sur ses deux coudes, le vacarme extérieur étant plus préoccupant que l'état de son téléphone, l'islandais tendit l'oreille... voire les deux... écoutant pendant quelques minutes. C'était visiblement le chaos, qu'est-ce qui venait de sauter comme ça ? Allant à la fenêtre, il observa l'extérieur : des gens courraient tous dans une même direction. Des militaires dans l'autre.
Non, ça sentait carrément le roussi ! Il fallait rappeler
Sara et lui dire de rentrer aussitôt ! Non pas qu'il lui faisait confiance pour se défendre toute seule, mais il préférait qu'elle soit à ses côtés, et loin de toute occasion de "se défendre", loin du danger, quoi... Même si cet hôtel n'était sans doute pas l'endroit le plus sûr au monde. Déversant tout un flot d'injures, l'expert mécano se jeta au sol et tenta de récupérer son téléphone coincé derrière l'armoire... Ce meuble était vachement gros, ce n'était qu'un amas de bois inutile avec des morceaux en fer inutiles qui contribuaient à le rendre encore plus lourd qu'il ne l'était déjà. Même
Ingvar aurait eu des difficultés à le déplacer... mais là n'était pas la question, le téléphone portable avait réussi à se caser d'une manière qui était impossible à retirer sans le voir...
Tirant de toutes ses forces, le colosse arracha l'objet de sa cachette, sentant quelque chose craquer sous ses doigts, tandis qu'un grincement peu rassurant se fit entendre au dessus de sa tête.
« Uh ?... » fit-il en relevant les yeux.La seule chose qu'il vit fut l'armoire qui s'élança sur lui. Ça allait faire mal...
SBRAAAM ! ~~~~~
Était-ce la vraie vie ? Était-ce juste son imagination ?...
Non non, pas de glissement de terrain ou d'éboulement, c'était malheureusement la réalité. Son crâne lui faisait mal et la dernière fois qu'il avait eu cette impression d'écrasement, c'était quand un présentoir d'énormes haltères avait basculé sur lui. Peut-être qu'il s'agissait d'une gueule de bois ?
Ouvrant lentement les yeux, il ne vit rien... Puis, lorsque sa vision se rappela de comment elle était censée fonctionner, il discerna ce qui était une grosse planche de bois qui s'était écrasée en plein sur son front. Ceci expliquait cela... C'était embarrassant, il venait de se faire mettre KO par une armoire ! Bon, au vu de la gueule du meuble, peut-être que quelqu'un de moins robuste que lui serait mort sur le coup, écrabouillé comme une crêpe et la tête explosée.
« Un jour 'vais crever comme une merde écrasée par un trois tonnes parce que j'aurais fait un croche-patte au cric... »Usant de son bras gauche,
Ingvar souleva légèrement l'armoire afin de libérer ses jambes et s'extirpa de l'emprise écrasante du meuble. Il avait l'impression d'avoir été roué de coups, chose qui lui était rarement arrivée... Légèrement tremblant à cause du choc, il attrapa sa grande veste en cuir et l'enfila sur le champ, s'asseyant quelques minutes sur son lit, le temps de reprendre ses esprits : il avait mal au front et à l'arrière de la tête, ce qui semblait logique, il s'était pris un gros coup sur la tête et avait basculé en arrière. Pas besoin d'être un génie pour deviner ça.
Se redressant vigoureusement, il atteignit la porte de sa chambre en quelques enjambées : il fallait qu'il sorte d'ici, qu'il puisse savoir ce qu'il se passait dehors, qu'il retrouve
Sara...
Trop pressé, il manqua de se viander dans le couloir : un chariot de bagages s'était interposé
(bon en fait il était juste là depuis des heures, tranquille, le pauvre), le contenu s'éparpilla au sol, révélant tout un tas de trucs... inutiles. Les yeux du colosse se posèrent sur un sac à dos à moitié ouvert. Sans trop savoir pourquoi, il l'attrapa et continua sa route, plongeant sa main à l'intérieur... Il lui fallait un nouveau téléphone portable pour appeler
Sara, malheureusement ses doigts n'effleurèrent que des objets sans valeur. De rage, il en jeta la moitié au sol avant de refermer le sac et l'accrocher à son épaule gauche.
Dévalant les escaliers
(non parce qu'en cas de catastrophes, il valait mieux pas songer une seule seconde à entrer dans un ascenseur !), l'islandais arriva au rez-de-chaussée, à l'accueil de l'hôtel : personne, des valises ça et là, il était seul au monde, ou quoi ? C'était stressant.
Avant de sortir, il remarqua un distributeur automatique dont la vitre était cassée. Le contenu avait sans doute été pillé par des petits profiteurs, car il ne restait plus grand chose... Ah non, sauf peut-être... Deux paquets de sandwich d'une marque bien connue. Regardant autour de lui, comme s'il essayait de voler quelque chose en temps normaux avec tout plein de gens autour de lui, il tendit le bras et, esquivant doucement les éclats de verre, récupéra les deux emballages en plastique qui contenait ces célèbres sandwich coupés en triangles. Rapidement, il fourra tout ça dans son sac. Il y avait bien une caméra de sécurité qui le "regardait"... Mais l'ordinateur du comptoir avait l'air éteint. Si ça se trouvait, la sécurité ne marchait pas. Petit coup d'œil pour vérifier... En effet, les interrupteurs pour appeler les ascenseurs n'étaient plus allumés, le courant était peut être coupé dans l'établissement.
** Et puis merde, quoi, 'faut bien que je mange, si y'a eu une attaque terroriste, je pense pas qu'il y ait grand chose d'ouvert pour faire ses courses. ** songea-t-il.Faisant quelques pas à l'extérieur, il plissa les yeux, avant de les écarquiller la seconde d'après : des morts... il y avait des cadavres au sol ! D'autres personnes, à l'autre bout de la rue, marchaient lentement en titubant, comme si elles étaient mal en point.
Qu'est-ce qui s'était passé ? Peut-être valait-il mieux demander à une de ces personnes ? Il n'avait pas très envie, en fait, quelque chose clochait... C'était peut être dû au fait du cadavre à quelques mètres de lui, ou de l'hôpital au loin qui semblait avoir un gros trou dans sa façade.
Au loin, les deux personnes qui titubaient s'étaient approchées d'une femme qui venait de tomber à terre. Malgré leur état, ils allaient essayer de l'aider ? La foi en l'humanité du colosse remonta légèrement.
« Greeuurbh... »Sursautant,
Ingvar s'écarta d'un pas du cadavre... Qui n'en était pas un, du coup, vu qu'il se releva lentement.
« Euh, m'sieur ? Z'allez bien ? »Bon, il était pas doué pour les premiers soins, mais il allait pas laisser cette personne crever sans essayer de l'aider... Avant même qu'il puisse réagir, l'homme s'agita brusquement et lui sauta dessus, l'agressant visiblement.
« Ow ! Mais j'suis là pour vous aider bordel ! »Par réflexe, il envoya un puissant revers du droit pour repousser cette personne, l'atteignant en pleine tempe, la forçant à reculer tandis que lui aussi s'écartait à nouveau de quelques pas.
« Vous d'vez être en état de choc ou j'sais pas quoi, ressaisissez-vous... »Il ne savait plus si c'était comme ça qu'on disait, mais son cerveau eut une petit absence lorsque l'homme se redressa à nouveau et qu'il put bien l'observer : il y avait quelque chose d'affreux, sa peau était décomposée ça et là, ses blessures étaient violentes, c'était un miracle qu'il soit encore en vie... Non non, c'était pas normal ! Avec le visage détruit comme ça, il ne pouvait qu'être en train d'agoniser de douleur au sol ! Alors pourquoi il s'approchait comme ça ? Pourquoi il grognait comme ça de manière malsaine... comme une bête affamée. Comme un zombie...
Au loin, par dessus l'épaule du "zombie",
Ingvar remarqua que les deux personnes qui titubaient étaient plus ou moins dans le même état que celui qui lui faisait face... et ils étaient en train de... déchiqueter la femme au sol.
« C'est pas possible... Merde... »Le zombie se jeta à nouveau sur lui, le faisait reculer d'horreur, trébuchant sur un tas de ferraille au sol, s'étalant à nouveau sur le dos : cette fois ci, pas question de se faire assommer ! D'un coup de coude, il fit lâcher prise à la créature, qui semblait prendre sa manche comme un morceau de viande... Toutes les histoires qu'il avait entendu à propos de ça, il valait mieux pas se faire blesser par une chose aussi répugnante, il voulait pas choper la mort.
« Lâche-moi, salop'rie ! »Alors qu'il donna un coup de pied rageur, sa main droite entra en contact avec un truc froid, métallique... un vélo ? Il était à moitié couché dessus... C'était le guidon arraché qui l'avait fait trébucher. Attrapant la selle sans trop réfléchir, il tira dessus, une fois, puis une seconde fois. Dans un grognement bestial, il fit sauter l'espèce de boulon qui maintenant le tout en place, se retrouvant avec la selle et un morceau du tube qui permettait de rehausser l'assise. Bon bah ça ferait l'affaire.
L'adrénaline l'ayant réveillé encore mieux qu'un demi-litre de café, le colosse se redressa et attendit son adversaire de pied ferme : il semblait pas être dérangé par son bras qui faisait un angle bizarre, ni par les blessures au visage ? Alors il allait lui exploser le crâne !
Dans un bruit peu ragoûtant, le tube d'acier s'enfonça comme dans du beurre dans le visage de la créature, entre les deux yeux :
Ingvar profita de sa force pour rendre son coup vraiment "mortel" (si d'aventure l'on pouvait qualifier le zombie de "vivant"). Retirant son arme de fortune de la carcasse poisseuse, prêt à donner d'autres coups, le cadavre, désormais inerte, bascula en avant, lui tombant dessus, puis au sol...
Bon, on allait pas rester ici, les deux autres choses qui dégustaient la femme à l'autre bout de la rue risquaient d'être aussi "sympathiques". Plutôt que d'utiliser l'adrénaline pour se battre, la brute préféra partir dans le sens opposé.
Ses pas le menèrent bien loin de l'hôtel, dans un coin plein de locaux en travaux. Il n'avait toujours pas lâché sa selle de vélo, le tube d'acier plein de sang en guise de manche, et la partie supérieure dont il avait arraché le cuir en chemin pour révéler la carcasse métallique au bout en forme de pointe. La luminosité commençait à décliner, ce qui signifiait qu'il était resté au moins quelques heures dans les vapes à cause de cette foutue armoire. Se précipitant vers un des locaux, il se posa devant la porte d'un où les travaux avaient été achevés et tenta d'ouvrir la porte. Fermé, évidemment... néanmoins, même si la porte semblait être plutôt robuste, la poignée était encore un modèle basique que l'on plaçait en attendant de mettre quelque chose de définitif en guise de serrure.
Cherchant quelques minutes autour de lui, il trouva un morceau de fer à la taille qu'il souhaitait
(l'habitude d'évaluer la clé plate qu'il fallait à la simple vue d'un écrou) et s'en servit dans la "serrure primitive", comme il aimait les appeler. Le tout ne grinça même pas...
Damn... C'était un truc bien avec les travaux de rénovation, c'est qu'il y avait du matos neuf !
Bon, il n'y avait plus qu'à faire très attention, ne pas se faire surprendre par un autre cadavre ambulant. Ou le moindre cadavre tout court, maintenant, s'il voyait un corps étendu au sol, il ferait en sorte de le contourner, ou de le tapoter du pied pour voir s'il réagissait.
Cet endroit pouvait être parfait pour passer la nuit, s'il fouillait tous les recoins pour vérifier qu'il n'y ait personne (c'était fermé, mais sait-on jamais !). Il pouvait ensuite déplacer ce gros frigidaire
(probablement vide) devant la porte pour pouvoir se caler dans un coin et dormir un peu. Il n'avait rien pour s'éclairer, donc autant s'improviser une forteresse pour la nuit.
Avec de la chance, il trouverait des trucs utiles...
[ Et une ch'tite fouille, une ! ]