Je réponds au highfive d’Alex, fier de nous. Ce nul d’indien, il n’aurait jamais fait le poids face à nous. Alors que mon ami guerrier regarde autour de la pièce pour vérifier que l’indien n’est pas caché quelque part, je remarque les traits sur ses joues. Le cachotier ! Moi aussi je veux des peintures de guerres indiennes ! Je lui arrache le pot de peinture des mains et me tartine les joues à mon tour. Là c’est sûr, l’indien ne pourra rien contre nous. Et pour être sûr je jette le pot de peinture de toutes mes forces vers le haut du bassin. Evidemment je n’arrive pas à le jeter dans l’eau et je le regarde retomber minablement, projetant son contenu un peu partout dans un grand bruit. Et je ris. De toute manière, cette peinture de guerre ne pourra plus servir maintenant qu’elle a été projetée partout. Je me frotte les mains comme si je venais d’accomplir une tâche importante et me retourne vers Alexander quand il dit avoir trouvé le dessert. Chouette, un repas de nobles, ça a forcément un dessert. Enfin je crois. Mais comme je suis noble, je décide qu’il faut un dessert et c’est parfait puisque Alex en a trouvé un. Je souris comme un fou en m’approchant de lui. Mes joues me grattent un peu, peut-être que l’indien avait mis du poison dans sa peinture avant de nous la donner. Ou alors j’ai attrapé des puces. Je jette des regardes inquiets à ma peau pour vérifier qu’aucune petite bestiole ne court dessus mais ma recherche est vite interrompue par l’arrivée d’un verre entre mes mains. Avec du thé dedans, trop bien ! Sans attendre, je porte le verre à mes lèvres. Le thé est trop chaud, il me brûle les lèvres et la gorge, mais il a bien meilleur goût que tous les autres thés du monde ! Oui j’ai envie d’aller à Disneyland ! Mais pourquoi il me parle de ça alors que mon corps entier est en train de fondre ? Heureusement, Alexander m’explique que c’est parce qu’il vient du Japon qu’il a un goût spécial. Rassuré, je porte à nouveau le verre à mes lèvres et en descend la moitié. J’ai l’impression que je vais cracher du feu et je ris. Ils ont du prendre du feu aux dragons du nouvel an chinois pour mettre dans leur thé. Oui c’est sûr, ils ont du leur piquer ça pour avoir tout le mérite. Du thé au feu de dragon c’est quand même vachement stylé. Pour vérifier, je souffle un coup mais je n’arrive pas à cracher du feu. «
J’en ai pas bu encore assez… » Alors j’avale la moitié de mon verre, pour essayer à nouveau de cracher le feu. Ca ne fonctionne pas et ça me frustre assez, mais encore une fois Alex coupe court à mes réflexions. «
Cuisiner de l’humain ? » Je hausse les sourcils en le regardant fixement pendant un moment. Et puis je regarde mes bras, mes cuisses. «
Ouais mais il faudrait quelqu’un de musclé pour avoir plus à manger. » Mais mon ami de m’écoute plus, trop perdu dans l’invention d’un nouveau plat. Alors je sautille tranquillement dans la pièce, sans écouter Alex.
J’observe des bocaux remplis de trucs dont je ne connais ni le nom ni l’utilité. On m’a toujours dit de ne pas toucher ce que je ne connais pas mais quand même, j’ai vachement envie. Il y a un bocal rempli de petites ampoules remplies d’un liquide violacé, j’aimerais bien goûter. Et un peu plus loin, un petit aquarium envahi par les algues où un poisson flotte, tout mort. Je tape sur la paroi pour être sûr, en encourageant le pauvre petit poisson à se réveiller mais il ne bouge pas cet idiot. Forcément, avec si peu de volonté on ne survit pas. La voix d’Alexander me fait sursauter encore une fois. Je me retourne vers lui pour râler que ça se fait pas de me faire faire des syncopes comme ça, mais sa théorie me laisse perplexe. Je me rapproche de lui et m’assois sur une chaise, tout près. Il n’a pas tord, c’est louche toutes ces histoires de sapins. Je regarde autour de nous si aucun sapin ne s’approche, et puis je me dis que peut-être, ils se sont adaptés. C’est vrai quoi, dans un aquarium il y a rarement des sapins, mais des algues… Je lance un regard suspicieux au bocal qui contient le poisson mort et les algues pour vérifier qu’il n’y a pas de petit indien. «
C’est vrai qu’il faudrait appeler la police. » Je fouille dans mes poches à la recherche d’un téléphone, et puis je me souviens qu’il n’y en a plus depuis que les zombies sont apparus. «
Si ça se trouve c’est les indiens qui ont lancé des zombies pour nous empêcher d’appeler la police. » Il a raison Alex, c’est trop dur d’être plus intelligent que les autres, il faudrait qu’on explique nos théories au monde entier et je crois que beaucoup ne comprendraient pas.
Alors que je regarde la fin de mon thé au fond de mon verre, le faisant tourner doucement pour essayer de réveiller le feu à l’intérieur, Alex se lève. Je ne le regarde pas, trop concentré sur l’invocation du dragon. De toute façon il revient et me met le destin du monde entre les mains. C’est trop pour moi mais s’il croit que je peux le faire, alors j’y arriverai. «
Je vais le faire. » Sans demander plus d’explications je finis mon verre d’un coup et je saute sur mes pieds. Cette fois ça y est, je peux cracher du feu c’est sûr. Mais je préfère garder ma flamme pour une occasion importante, quand j’aurai trouvé l’indien par exemple. Je mets un gros bocal vide sur ma tête pour me faire un casque super classe et sors en titubant de la planque de l’indien. Il faut qu’on le trouve et si Alexander est trop fatigué pour le faire, alors je le ferai.
© TITANIA