Le problème dans cette apocalypse, c’est qu’on s’ennuie pas mal. Enfin je sais pas vous, mais perso je commence à me faire chier à parler tout seul et à tourner en rond. Y a bien Seth, mais Seth je crois qu’il n’apprécie pas trop de m’entendre raconter des conneries à longueur de temps. Et puis il doit penser que je suis fou. Et ne pas comprendre pourquoi il se passe ensuite des heures sans que je n’arrive à ouvrir la bouche. Mais tant pis, moi je le trouve marrant avec ses prières et ses sourcils froncés quand je jure en oubliant qu’il est croyant. On a pas idée de croire en D.ieu dans un moment pareil. Mais après quelques débats houleux sur la question, j’ai compris que c’est un sujet plutôt délicat pour le bonhomme, alors je n’en parle pas, comme ça tout le monde est content. N’empêche que D.ieu , c’est un salaud de nous balancer des zombies sur la tronche. Mais c’est bon, j’ai compris, je la ferme.

Et je la ferme tellement que je me suis tiré discretos avec mon katana dans le dos. J’ai décidé de le porter avec une classe infinie comme les ninjas, même si effectivement, c’est pas très discret. Mais vu la taille du bordel, je pouvais difficilement le cacher dans ma poche. J’ai donc laissé Seth en racontant que j’allais chercher des provisions, mais j’avoue que je ne cherche pas grand-chose. Je flâne un peu, comme si je ne savais pas ce que c’était qu’un zombie, et finalement je ne trouve rien. Par contre, c’est un drôle de bonhomme qui me trouve au coin d’une rue, pile en même temps qu’un autre type qui devait trainer par là. C’est un lieu de rencontre pour survivants perdus ici ?

Un peu méfiant, je ne me laisse pas trop approcher, et pourtant le petit bonhomme bizarre réussit en quelques mots à piquer ma curiosité. Récupérer des affaires volées ? Mouais. J’essaie de jauger un peu les gars, et puis finalement je me dis que ça pourrait être marrant, d’être emmené où je veux. Seulement je vois pas trop comment il pourrait m’emmener quelque part, sauf en me portant sur son dos. Alors quand même, je demande avant d’accepter n’importe quoi, parce que si je ne tiens pas énormément à la vie, je n’ai pas trop envie de crever dans d’atroces souffrances, torturés par un gros type tout moche. « Tu vas nous emmener comment hein ? T’as un carrosse ? Et ils vous ont volé quoi d’abord ? » Je suis chiant, mais c’est qu’il inspire pas trop confiance ce gars-là, alors je croise les bras en prenant l’air le plus sérieux du monde en attendant ma réponse.

De loin, tu aperçois deux bonhommes ; ils font directement penser à des marins. L'un est joufflu, l'autre trapu. Ils n'ont pas l'air d'avoir grand-chose en commun à part leur espèce de tee-shirt marinière crasseux. Ils t'ont vu marcher vers le port et ils ont l'air de discuter entre eux jusqu'à ce que l'un soit poussé par l'autre pour venir te parler. Enfin, « vous » parler. De l'autre côté, un grand brun semble aussi attiré par la légère activité des deux marins au milieu du port, seuls. Il semble aussi prudent que toi et tu avances à pas mesurés. Tu atteins l'homme joufflu peu après lui mais tu entends tout de même de quoi il retourne.

De suite, tes instincts sonnent l'alarme. Ça pue tellement le coup foireux que tu fronces les sourcils et fais une moue dubitative. Tu comprends que le marin devant toi n'ose pas se frotter aux « deux trois hommes » : il exsude le manque de témérité. Mon regard se porte sur l'autre derrière qui, lui, semble plus apte à remplir la mission.
L'homme arrivé en même temps que toi pose des questions judicieuses et tu en rajoutes une couche avant que le marin ne prenne la parole. Souvent, quand les gens sont déstabilisés, ils ont du mal à tenir leur baratin, si mensonge ou incohérence il y a. « Et ils ressemblent à quoi ? Ils étaient armés ? Beaucoup ? Vous auriez des choses à échanger autres qu'un voyage en bateau contre ce « service » ? » Tu le fixes sans ciller, attendant sa réaction.

Pour ta dernière question, il est vrai que, vu ta situation, ce n'est clairement pas ce dont tu as besoin. La survie avant tout. Et puis aller batifoler au milieu de l'océan pour risquer de faire naufrage, merci mais non merci, tu préfères tenter ta chance dans les bâtiments en ruine et plein de zombies.

L'jumeau il a coincé un grand maigre mal coiffé, moi j'me dis qu'un gringalet comme ça, il servira même pas de bouclier vivant... Avec son air méchant, on dirait le caniche de ma voisine Christie... On est dans l'port et lui qu'il d'mande avec quoi qu'on va s'mouveoir, Hitchy ça l'fait rire, qu'il lui dit : "avec l'rafiot, on est dans un port pardi !". Et de rire de son rire bien gras. Y en un autre qui s'ramène, un peu plus musclé, mais il baragouine un tas de questions, j'comprends rien. J'ai déjà oublié la précédente qu'il en pose d'autres.

"Des militaires !
- Ils étaient trois...
- Non deux ! Il m'agace Hitchy, il dit que des bêtises ! Ils sont v'nus avec leurs vilaines armes et ils ont...
- volé tout l'matos du rafiot !
-Hitch ! Tas toi !"

Je lui décolle un gifle légère sur le haut du crâne, mince alors!  C'moi l'grand d'la famille ! Je finis pas sortir mes poches d'mon bleu d'travail pour montrer qu'à part notre coque on a rien quand des clefs s'font la malle. Ben tiens !

"J'peux vous filer les clefs de hangar d'patron ! Y'a heu... des trucs quoi..."

Hitchy m'fait son regard d'colère, mais c'est sa faute aussi il raconte n'import'quoi ! J'dis aux minets : "j'vais vous montrer ou qu'ils s'cachent, si vous voulez !" Tout en parlant, j'fais signe à Hitch de montrer l'chemin. Sauf que c''t'andouille met son panard dans un tas de tuyaux qui font un raffut du diable. Par chance, on est encore loin d'la cachette d'ces foutus chipeurs mais j'doute que nos amis puissent quitter l'port sans s'faire percer un autre f... Ils sont obligés de v'nir avec nous et zigouiller les vilains !

Les deux gars ont l’air des pires demeurés que j’ai croisé depuis… Depuis un moment. Je fronce les sourcils en les écoutant baragouiner leurs conneries, parce que j’essaie quand même de comprendre ce qu’ils ont comme problème. Les deux gars, ils ressemblent aux deux gros dans Alice au pays des Merveilles. J’ai oublié leurs noms, mais je suis sûr que ces deux marins pourraient les jouer. Je crois. Je les grave dans un coin de ma tête, et aussi je jette un coup d’œil à l’autre type, qui est arrivé en même temps que moi. Lui non plus, il n’a pas l’air méga confiant, parce qu’il fait une drôle de tronche et il pose encore plus de questions que moi. Il paraît que les militaires étaient deux ou trois, mais je ne suis même pas sûr que ces gars savent compter, alors je ne me fie pas trop à leur estimation. Cela dit, ça ne coûte rien d’aller voir, si ? Espérons que non. Je ne dis rien quand les mecs font leur baratin, et je hausse les épaules quand il propose de nous filer les clés de leur hangar. Tu parles que j’en ai quelque chose à foutre des trucs qui sont enfermés là-dedans. Si c’est pour récupérer une corde et trois planches de bois, je crois que je préfère encore faire un tour en bateau !

L’un des deux idiots dit que c’est le moment d’y aller, qu’ils vont nous montrer, et l’autre commence à marcher pour nous montrer où les autres se sont planqués. Moi qui m’ennuyais, voilà au moins une occupation qui risque de me prendre un moment ! J’emboîte le pas des deux bizarres, en prenant garde de rester à distance, mais on ne va pas très loin. L’un des deux, le plus petit, il se prend le pied dans un truc et ça fait un tel bordel que je soupire comme jamais. On n’est pas sortis de l’auberge s’ils sont aussi doués l’un que l’autre. Faudrait peut-être limite que j’y aille tout seul, avec l’autre inconnu à la limite, qui a l’air toujours aussi perplexe. Je suis quand même les deux gaillards, parce que je suis vraiment, vraiment gentil, mais je lance tout de même un regard un peu inquiet à l’inconnu qui a l’air moins débile que les autres, l’autre solitaire qui s’est fait attraper en même temps que moi. J’espère que les "méchants" sont sourds, parce que sinon on risque de se faire accueillir bien gentiment...

J’sens qu’les regards convergent vers moi, alors à mon tour j’regarde l’frangin. Il me regarde. Il regarde les deux gus. Il m’re-regarde. Pis Cock hausse ses épaules, l’air de dire qu’il en savait foutrement rien – ce qui est le cas – et qu’il s’en fiche. Nous s’qu’on veut, c’est faire voile vers… j’sais pas moi, les Bahamas ? Avant qu’nos gros bras s’fassent la malle, j’ouvre grand la bouche pour baragouiner une histoire qui tienne la route. Mais avant que le frangin n'invente un attirail pour nos voleurs de matériel, une voix sèche nous arrête.

« Hé ! Vous, là ! »

Trois militos nous tiennent en joue avec leurs machins qui tuent des gens, c'est la fin, c'est sûr. ils vont nous tuer. En plus ces ptits merdeux ont pas l'air d'être de grands humanistes, ptetre même qu'ils vont nous tuer et balancer nos corps à la mer...

« Allez, on les descend !
- Attendez ! J’regarde Cock qui essaie de d’venir plus blanc qu’la Sainte Mère, on a un bateau, et a c’qui paraîtrait, si on quitte la ville vers le nord, y a moins d’ces bestiaux ! Sauf que la baie d'Oakland, pour s'casser d'ici, c’un vrai champ de mines !
- C’est vrai ça ! Si vous partez seul, z'allez vous échouer... Mais nous on sait comment qu'il faut y naviguer ! »

[Diplomatie : réussite]

Les militos s’regardent, ils ont envie d’se casser d'c'te ville, comme n’importe qui. Alors ils s’mettent à parler entre eux, très vite et à voix basse, puis décident d’nous emmener vers leur chef, là où qu’ils ont volé not’ matos ! La bonne nouvelle c’est qu’on est dans leur planque. L’autre ? C’est qu’ils sont AUSSI dans leur planque.