Hier, tu avais reçu un coup de fil un peu alarmiste. Tu n'étais pas chez toi, juste en bas de l'immeuble, le nom qui s'affichait était celui d'un type qui se croyait ton ami. Il avait souvent d'assez bonnes infos sur les soirées infirmières ou un dealeur pas trop cher. Tu prends son appel.

SAM: Ethan, tu vas pas me croire! L'hôpital où ça puait! Eh bin c'est vrai!

Ça t'intéresse mais tu ne dis rien. Tu le laisse poursuivre, t'es pas un grand bavard, ta salive c'est que pour les grandes occaz'! Ton pote continue, dépité de son non-effet de surprise.

SAM: Les militaires sont là! Ils font reculer les gens et la porte a pété. Hey! Ça commence à tirer!

En effet, t'entends les coups de feus, et puis tu vois les militaires galoper en contre sens. Tu raccroches sans mot dire. Y a du vielle qui veut l'ascenseur, tu fermes les portes juste avant qu'elle n'arrive. Elle pue le chat à six kilomètres et en plus... en plus tu l'aimes pas.

Tu fermes la porte à double tour, t'es pas peureux mais juste méfiant. Demain t'ira pas en cours, histoire d'être sûr qu'il n'y a pas de soucis. Tu te bricole un sac de denrées sèches, le genre de truc que t'as vu dans les films de Norris. Il passe à peine une heure avant que ça commence à canarder vers chez toi, des cris et des balles. Tu éteins ton téléphone, même avec Sam qui t'inonde d'appels. Avant de fermer définitivement tes volets, convaincu que ta ville a une couille, tu regarde en contre bas. Sans oser y croire, le mot « zombie » te saute à la gorge. Ton semestre à la fac va mal finir...

T'ose même plus tirer la chasse, t'as peur que la vielle aux chats d'en dessous se ramène. Après tout, tu l'as entendue râler et devenir un monstre. Au final, tu bouffes la viande et les laitages en premier, comme un bon petit scout. Ça fait pas trop Walking Dead mais plutôt Couard Land, l'essentiel c'est de survivre. Jusqu'à quand?



Bouffer des pitchs ad vitam aeternam va te rendre fou. Fou et obèse. De toute façon, y'en a plus, et gros daleux que tu es, t'as même bouffé ton sac de survie. Du coup, t'es forcé de sortir, sauf si tu préfère crever la dalle. Tu connais le chemin, tu descends, tu traverse la rue et en face t'as un petit épicier. Ouais, celui a qui tu achète de l'alcool quand t'es pressé. Il ne doit plus être derrière sa caisse à l'heure qu'il est, mais y'a moyen de trouver un petit peu de bouffe viable et de retourner te terrer dans ton appart. Hum, d'ailleurs tu pourrais faire le ménage: ça pue.

Tu prends tes clics et tes clacs et tu sors enfin, avec mille précautions. Tu entrebâille la porte et passe ton nez au travers, personne. Tu descends sur la pointe des pieds, ça c'est une première parce que d'habitude tu t'en contrebalance des gens... La porte ne grince pas, et même tu la retiens. Vérifie une dernière fois que tu as bien tes clefs... oui, c'est bon on peut y aller. La rue est vide, tu traverse en vitesse, plus que dix mètres à faire en remontant la rue et c'est bon. T'y voilà, un petit magasin fourre-tout. La porte est presque ouverte, il te suffit de pousser. Tu files direct au rayon bière, tu t'en enfile une quand un bruit de fait sursauter. Ravales ton insulte et sue à grosses gouttes. Ça s'agite sous une colonne de pain de mie effondrée. Merde merde merde. Tu te cache derrière les bières, t'as pas une meilleure idée, hein?

Y a de plus en plus de mouvement, jusqu'à ce qu'une tête émerge! Une tête bien en chaire, rose à point. Tu sors de là comme si de rien était, tu tends la main à la fille. Blonde, pâle et maigre. Aucune blessure, ça c'est un bon point. Mignonne aussi. Tu la prends avec toi. Elle porte le pain de mie et toutes les soupes lyophilisées que vous avez trouvées. Toi tu te charges de l'eau en bouteille et d'un max de pitchs. C'pas si mauvais...

Tu l'envoie à la douche, passer une semaine sous du pain ça rend puant.



Elle s'appelle Mary, à ton âge et est naïve comme pas permis. T'as essayé les allusions perverses mais ça ne marchait pas. Du coup bah t'es repassé en mode carpe. Elle dort sur le canap' parce que bon, faut pas abuser... Hier elle a passé le balais et aéré (contre ta volonté mais vu que tu refusais d'ouvrir la bouche)... Aujourd'hui elle veut descendre les poubelles. Y a bien un petit local au -1 mais bon... Tu cède, vous y allez tout les deux.

Tu ouvre, elle entre et jette. Sauf que t'avais pas prévu (c'est vrai, hein) qu'une ménagère du dimanche avait décider d'aller y mourir et ressusciter. T'as fermé la porte en vitesse alors que Mary suppliait et hurlait de peur. Puis de douleur. T'es parti la queue entre les jambes, t'as fermé à triple tour cette fois. Retour à la normale. Tu l'as même pas sauté...



Ce matin tu te lève, la bouche un peu pâteuse. Il reste pas grand chose à manger. P'tetre un pitch sauvage. Avant d'avoir pu l'ouvrir, ça sonne. Tu sursaute et fais tomber ton pitch par terre, il s'écrase mollement alors que toi, bah tu flippe un peu. Qui ça pourrait être? Personne putain, c'est l'apocalypse. L'âme revancharde de Mary? Ouarf, quand même pas! Tu te décide à aller jeter un œil au Judas. Cette tête déformée te dis quelque chose. La forme chuchote un truc. Ohhhhh! Mais c'est Sam! Tu ouvres en vitesse, le regarde sous toutes ses coutures et admet qu'il est clean. Même si il a perdu au moins cent kilos! Le type dépose un sac plein de victuailles. Du genre Oréos...

SAM: Hé mon pote! Il m'a fallut du temps avant de te trouver!
ETHAN: Qu'est ce que tu veux Sam? C'est pas le jour des visites...
SAM: bah, j'sais même pas quel jour c'est!

Tu lui concède ce point, en plus il a des Oréos! Bon, faut bien accepter...

Sauf que les Oréos c'pas eternel, dans trois jours, peut être moins, va falloir sortir.




Effectivement, y a plus d'Oréos, et ce plus tôt que prévu... va falloir retourner là où t'as trouvé Mary, et franchement ça te tente pas. Sam te convainc, son estomac fait du bruit tout le temps, ça te gave. T'hésite à l'abandonner. Il serait capable de revenir ce con...

Vous sortez avec plus encore de précautions, vous traversez consciencieusement, mais cette fois, les morts vivants sont plus proches. Tu flippes ta race. Vous entrez, vous ressortez. Des soupes, encore. Et une bière, que Sam tient en équilibre. Tu sens la mort venir un instant avant que le liquide n'ait un remous et tombe. Un bruit qui résonne longtemps entre les murs et sur les pavés. Avant que tu ne puisse courir, ils sont là, harponnés par le bruit. La gueule grande ouverte, tu les esquives mais Sam... non. Il se fait mordre le bras au moment ou vous arrivez devant la porte vitrée de chez toi. T'as jamais ouvert aussi vite, tu fermes derrière Sam.

Vous montez, tu le fais s'allonger, soi disant pour ralentir le sang. Tu fais un garrot factice et le gave de dolipranes. Tu fais semblant, il s'endort confiant. Dès minuit, tu t'esquives sans prendre de bagages.



Première nuit à la belle étoile. Réveil difficile.